Longtemps, Anne-Sophie n’a pas compris celles et ceux qui couraient des kilomètres sans s'arrêter pour le plaisir de se dépasser. Jusqu’au jour où la course à pied s'invite progressivement dans sa vie pour ne plus jamais la quitter. Alors qu'elle prépare son premier marathon, elle tombe enceinte et choisit de poursuivre son entrainement. Courir enceinte lui offre un nouveau rapport à son corps, à sa maternité et à sa puissance intérieure. Au fil des foulées, elle construit un équilibre pour elle, son couple, sa famille. Parce que oui, courir quand on attend un bébé, c’est possible, et ça donne même une tout autre saveur quand on franchit la ligne d’arrivée...
" Je m’appelle Anne-Sophie, j’ai 36 ans.
J'habite à Fouesnant dans le Finistère, et je suis aide-soignante, actuellement en congé parental.
Ma famille est composée de mon mari Vincent et de nos trois filles : Lexie-Rose (6 ans ½), Cassandre (4 ans ½) et Victoire (2 ans ½).
Je viens d’une famille dans laquelle ça n’a pas toujours été simple d’évoluer. Mes parents divorcent quand j’ai 8 ans et ma maman refait sa vie avec un homme qui a lui aussi des enfants. Nous sommes six à la maison (dont ma sœur avec qui j’ai un an d’écart), et ce ne sont pas des années très heureuses pour moi. Je veux rapidement prendre mon indépendance et construire ma propre vie.
La femme de ma vie, ma reine, ma lumière, c’est ma grand-mère, Nicole. C'est elle qui me montre l'amour inconditionnel et qui m'apporte la sécurité affective dont je manque. Ce sera très éprouvant pour moi de la perdre à l’été 2020 alors que je suis enceinte de ma deuxième fille.
“ Au début, le sport ne fait pas vraiment partie de ma vie. Je ne comprends pas les gens qui courent des kilomètres sans s’arrêter. “
--- Mai 2013
Je rencontre Vincent dans un club de vacances en Bretagne, où il est barman et moi animatrice. Nos jobs d’été respectifs. Après la saison, nous décidons rapidement de prendre un appartement pour vivre dans la même région, en Bretagne.
Une chose un peu folle pour moi qui suis une paniquée de l'engagement et qui étais certaine de finir célibataire entourée de mes chats (de rien pour le cliché !).
J’ai tout de suite confiance en Vincent. Je sens que c’est un homme très respectueux, investi dans tout ce qu'il entreprend. Je sens qu’on peut aller loin ensemble.
Au début, le sport ne fait pas vraiment partie de ma vie. Je ne comprends pas les gens qui courent des kilomètres sans s’arrêter. Je fais un peu de piscine et de crossfit mais c’est plus pour perdre du poids qu’autre chose. Je cours ponctuellement mais je n’accroche pas vraiment... Vincent tente de m’initier mais ça ne fonctionne pas. D’ailleurs, à ce moment-là, c’est plutôt une source de conflits entre nous. Vincent me donne des conseils que je ne veux pas suivre.
--- Janvier 2022
Après deux grossesses rapprochées durant lesquelles j’ai été très sédentaire et où j’ai pris pas mal de kilos, j’ai envie de reprendre possession de mon corps avec lequel c’est un peu compliqué de composer. Et comme aller à la salle de sport devient impossible à caser dans mon agenda, je commence à me mettre à courir, et cette fois de manière régulière.
--- Août 2022
Je tombe enceinte sous stérilet alors que je suis en pleine préparation de mon premier marathon. Je m’en aperçois car, comme pour mes deux précédentes grossesses, je fais de nombreux malaises vagaux.
--- Octobre 2022
Je suis suivie par une nouvelle gynéco qui ne voit aucun risque à ce que je poursuive ma préparation. Je suis en confiance et ses paroles me libèrent vraiment. Je m’entraîne avec Vincent et, cette fois, ça marche entre nous. Il devient mon meneur d'allure, mon repère, mon allié, mon binôme, mon partenaire. À ses côtés, je cours donc mon premier marathon, ma fille dans mon ventre. C’est magique ! Ça me connecte littéralement à mes capacités de mère, à ma force intérieure.

À partir de là, la course à pied devient centrale dans ma vie et je commence à me renseigner sur la pratique de la course à pied, enceinte. Je lis pas mal d’études sur la grossesse et le sport. Rapidement, je me rends compte que faire du sport enceinte, c’est bénéfique, et c’est même une recommandation ! À condition de ne pas avoir de contre-indication et d’être suivie par un médecin.
En fait, c’est propre à chacune, l’important c’est d’adapter le rythme et la cadence en écoutant son corps. Ce discours, je peux l’avoir aujourd’hui sans culpabiliser grâce à des femmes comme Blandine L’Hirondel (@lagynecosportive), championne du monde de trail et gynécologue-obstétricienne, qui défendent grossesse et sport, et notamment la course à pied, enceinte.
“ Enceinte, je cours par pur plaisir, en aisance respiratoire, je ne cherche pas à performer. “
Et dans mon cas, je vois tout de suite la différence avec mes deux autres grossesses. Là, en pratiquant la course à pied enceinte, je n'ai plus de malaises, mes nausées et mes migraines disparaissent. Je me sens bien dans mon corps. A l’inverse, quand je passe une journée sans rien faire, je ressens mes symptômes de manière forte et je suis très inconfortable.
Mon médecin traitant m'explique alors que la course à pied favorise le retour veineux et artériel, ce qui explique que ça réduise ou supprime les malaises vagaux et les baisses de tension dont je souffrais avant.
“ Finalement, la limite que je me fixe pour arrêter de courir, c’est la date de mon terme ! “
Enceinte, je cours par pur plaisir, en aisance respiratoire, je ne cherche pas à performer. Je conserve les mêmes habitudes qu'avant ma grossesse et je ne cherche pas à les augmenter. Je n’hésite pas à réduire la cadence quand je sens que c’est nécessaire, et à favoriser un terrain plat pour limiter le risque de douleurs ligamentaires. En fait, j’écoute mon corps, tout simplement.

--- Juillet 2022
Je suis à 6 mois et demi de grossesse quand je cours ma dernière course officielle avec dossard, munie de mon certificat médical. 10 kilomètres durant lesquels je dépasse plein de gens avec mon ventre bien rond. Chouette expérience !
Finalement, la limite que je me fixe pour arrêter de courir, c’est la date de mon terme... Et l’avenir me donnera raison : je cours jusqu’à la veille de mon accouchement. Sur le parking de la maternité, après avoir perdu les eaux (et avec l’accord de l'équipe médicale), je me revois faire des tours pour activer le travail (je serai finalement déclenchée le lendemain).
Après mon accouchement, je fais une rééducation périnéale précoce avec une kinésithérapeute du sport. Je remobilise assez vite mon périnée, ce qui permet une meilleure récupération (et réduit le risque de fuites urinaires au passage). Cinq semaines après mon accouchement, je me sens prête à recommencer. J’alterne la marche et la course. J’y vais en douceur. Là encore, je ne cherche pas la performance, juste à retrouver des sensations, de bonnes sensations, avec la course à pied.
Au final, je reprends un bon rythme et je cours mon deuxième marathon, 6 mois après avoir accouché.
“ Quand nous préparons un marathon familial, nous faisons toutes nos sorties ensemble, mon mari et nos trois filles. Ça crée du lien, de la complicité, une solidité et une connexion. “
Mais ce n’est pas ça le plus important pour moi. Ce que j'aime le plus dans la course à pied, c’est de courir des courses officielles avec mes enfants. Quand nous préparons un marathon familial, nous faisons toutes nos sorties ensemble, mon mari et nos trois filles. Ça crée du lien, de la complicité, une solidité et une connexion. Quand je cours en famille, ce sont mes tripes de maman que je dépose à chaque foulée.
Et puis pour mon couple, c’est un vrai équilibre, un des ciments de notre relation. Mon mari est souvent absent pour son travail et je me souviens de notre première préparation au marathon de Tours, que l'on a couru tous les 5, ça a été de retrouvailles après 7 mois d'absence.
Un marathon, c’est comme la vie de parents, ça semble parfois impossible, on se demande comment on va y arriver... Et puis on s'accroche parce qu’on a envie de vivre du beau et des émotions incroyables, et quand on franchit la ligne d’arrivée, c'est encore plus dingue. Finalement, on tient bon, même quand ça semble impossible ou perdu d’avance, et ça rend les victoires encore plus belles ! "

Les tips d’Anne-Sophie
Ne pas avoir peur de bouger, de rester en mouvement, enceinte.
Grossesse et sport, c'est compatible, ça peut même donner confiance en soi.
Courir avec des chaussures adaptées pour éviter de se faire une entorse.
Ecouter son corps et ses ressentis pour courir à son rythme et avec envie.
Se faire suivre par un gynéco du sport quand on est enceinte et sportive.
Se faire accompagner par une kinésithérapeute du sport pour la rééducation périnéale précoce.
Sa pensée freestyle
Pendant la grossesse, le sport n’est pas seulement possible, c’est essentiel ! Avec le bon encadrement et des pros de santé spécialisés dans le sport, bouger pendant la grossesse devient un acte puissant pour toi et pour ton bébé !
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Courir enceinte ou en poussette, et à plusieurs, c'est possible avec le Mama Running Club dont fait partie Anne-Sophie.

