Cacher à ses proches sa difficulté à tomber enceinte - Asléa

Cacher à ses proches sa difficulté à tomber enceinte - Asléa

Asléa aime voyager, explorer et se sentir libre de parcourir le monde avec son mari. Longtemps, elle a cultivé cette image de la fille qui “profite” d’une vie sans enfants. Elle a fait comme si”, comme si c’était son choix de ne pas fonder une famille. Mais dans le secret, elle et son compagnon ont désiré cet enfant qui ne venait pas... Des années à attendre, à devoir composer avec la pression de l’entourage qui ignore tout de leur secret. Des années à faire de leurs voyages des bouffées d’oxygène. Et puis un jour... 

“Je m’appelle Asléa, j'ai 36 ans. 
Je vis à Paris et je suis consultante en gestion de projet. 
Ma famille est composée de mon mari, de notre fils Amaziah (notre pépite) et du fils de mon mari (seconde pépite), ainsi que de nos parents, de nos frères et sœurs, et de nos amis proches. 

Je rencontre mon mari au travail grâce à des amis en commun. Très rapidement, on accroche et, le premier soir au téléphone, il me surprend en me parlant déjà de mariage... Et un an plus tard, une fois mon père de retour de l'étranger, on s’est en effet mariés ! Pour la petite anecdote : après avoir vu mon mari pour la première fois, j'ai appelé ma meilleure amie pour lui dire que j'avais rencontré “l'homme de ma vie”. Sur le coup, je voulais la faire rire mais finalement j’avais eu une bonne intuition... 

La première fois que nous parlons de faire un enfant, c’est quelques mois avant notre mariage. Lui a alors 30 ans et moi seulement 23. L’urgence pour lui de fonder une famille ne l’est pas pour moi, je me sens trop jeune, pas prête, et c'est alors un vrai point de rupture entre nous. D’ailleurs, c’est une période durant laquelle on se sépare. Sur le moment, honnêtement, je ne vis pas mal cette décision, je l'estime logique et honnête compte tenu de ce point de divergence essentiel. Finalement, mon mari finit par comprendre mon point de vue, il est prêt à attendre et on se marie donc en mai 2013.

(...) j’intègre complétement la parole de la médecin : "Scientifiquement pas possible mais on ne sait jamais ce que le bon Dieu va décider”.


Après deux ans de vie à deux et plusieurs très beaux voyages, je commence à me sentir prête. Mais je ne tombe pas enceinte... Je vais consulter une gynécologue et, après plusieurs examens, le couperet tombe : il va être difficile pour nous d'avoir un enfant naturellement. On nous dit tout de suite que sans PMA, ça semble impossible mais je n’accepte pas l’idée d’être inséminée. Mon mari sort du rendez-vous, abasourdi. Moi, j’intègre complétement la parole de la médecin : "Scientifiquement pas possible mais on ne sait jamais ce que le bon Dieu va décider", et je relativise. Je fais même plus que relativiser, je tombe clairement dans le déni, je me persuade que je vais avoir un bébé naturellement 


Cette pression sociale commence sérieusement à nous agacer !  
 

La vie continue... On ne dit rien, à personne. On veut garder cette difficulté pour nous. Je fais une partie des examens mais j’arrête en cours, je ne veux plus me focaliser sur le sujet et je me dis que ça va venir. Tous les mois, je vérifie ma date de règles (toujours une part de déni) et je suis dans l’attente. Une attente qui alourdit le poids de l'absence de vie dans ce ventre qui reste vide. Sans compter la pression de nombreuses personnes plus ou moins proches qui se sentent obligées de me rappeler que je devrais faire des enfants, que les enfants c'est génial, qu'il ne faut pas que j'attende trop... Cette pression sociale commence sérieusement à nous agacer ! Alors on force le trait en disant que l’on veut « profiter » et on se prend vite au jeu. Je profite d'une petite crise de la trentaine en avance pour tout plaquer et faire ce dont j'ai toujours rêvé : un voyage de plusieurs mois au gré de mes envies. Je sens alors que j’ai besoin de retrouver une certaine liberté, de ne plus penser à cette grossesse qui ne vient pas, ne plus avoir de contraintes et de simplement me concentrer sur le moment présent. Je parle à mon mari de mon projet et, il faut croire qu’il aime autant les défis que moi, puisqu’à son tour il s'organise pour me suivre.


L’addiction pour l’ailleurs s'est installée à défaut d'une chambre d'enfant. 

 

Janvier 2018. On part pour les mois les plus formidables de notre vie (jusque-là) avant de revenir chamboulés par les belles rencontres et les beaux paysages que l'on a pu observer. On décide de s'installer dans notre quartier de prédilection, Montmartre, dans un appart beaucoup plus petit, style cocooning, jeune couple. C’est là qu’on vit une nouvelle jeunesse : on sort très souvent et on continue de voyager très, très régulièrement. L’addiction pour l’ailleurs s'est installée à défaut d'une chambre d'enfant... Pour moi, les voyages, c'est la liberté. Je trouve le train-train du quotidien oppressant et j'ai l'impression qu'il consume les gens à petit feu. Alors voyager, c'est ma manière de reprendre un maximum d'oxygène pour supporter les quelques semaines ou mois avant la prochaine destination. Et puis j'aime aussi l'idée d'être une autre personne en voyageant, de dépasser mes craintes et d'aller de l'avant sans trop vraiment savoir ce qui m'attend. 

2020. Je décide qu'il est temps d'accepter ma défaite. Je rencontre une super gynécologue (dont certaines femmes parlent dans les épisodes de Bliss Stories). Après plusieurs essais d'insémination infructueux, je me lance dans tout un tas d’examens aux noms improposables (hystérosalpingographie*, bonjour !).

 

 (...) je découvre que mon fils, “ma pépite”, s'est installé tout seul dans mon ventre.  
 

Juin 2022. J'obtiens enfin le “graal” ! Mon rendez-vous à l'hôpital pour le prélèvement de mes ovocytes. C’est la première étape. Puis, je dois attendre septembre pour la seconde partie : le transfert d'embryons. Je profite de l'été pour voyager encore et toujours, puis septembre arrive et mes règles semblent tarder... je suis épuisée et je fais quelques malaises. Une amie me conseille de faire un test (elle n'est évidemment pas au courant de ma situation et de mes démarches en PMA). Je le fais sans y croire et je découvre que mon fils, “ma pépite”, s'est installé tout seul dans mon ventre. Neuf mois plus tard, on décide de l'appeler Amaziah, “la force de Dieu” en swahili. Un prénom qui résonne avec les paroles de cette première gynécologue : "Scientifiquement pas possible mais on ne sait jamais ce que le bon Dieu va décider". Des mots qui m'avaient permis de garder espoir.

C'est comme si malgré ces années durant lesquelles la nature m'avait refusé la maternité, j'étais enfin arrivée à devenir maman en nourrissant par moi-même ma petite pépite.  
 

Mon moment de bliss à moi, c’est quand, au bout de quelques minutes de vie, posé sur mon ventre, mon fils remonte tout seul pour chercher à téter. Cette première tétée est “WAOUW”. Je n’hésite pas une seule seconde à l'allaiter et chaque tétée est un moment où je me sens hyper puissante et à ma place ! C'est comme si malgré ces années durant lesquelles la nature m'avait refusé la maternité, j'étais enfin arrivée à devenir maman en nourrissant par moi-même ma petite pépite. 

 

“ Le chamboulement est immense et l'ensemble de la société fait comme si c'était encore à nous de nous réadapter. “ 
 

Autant je m’attendais à être malade pendant la grossesse, à souffrir pendant l’accouchement, autant je ne m’attendais pas à avoir aussi mal les premières semaines de mon post-partum. Première grosse claque : je ne peux pas m’asseoir normalement ! L'épisiotomie me fait souffrir pendant deux bonnes semaines. Moi qui pensais avoir la capacité de tout de suite enchaîner les sorties et promenades avec mon bébé, je comprends vite que je ne peux pas tout maîtriser. Deuxième grosse claque : la reprise du travail, seulement deux mois et demi après avoir accouché, avec une charge mentale que je n'avais encore jamais connue. Je trouve très dur de devoir laisser mon bébé des journées complètes à la crèche (vive la culpabilité maternelle) et puis de devoir être aussi productive qu’avant au travail avec des nuits de sommeil trop courtes, le tout en tentant de maintenir à flot ma vie de couple, de femme, d’amie, de fille, de sœur, etc… Le chamboulement est immense et l'ensemble de la société fait comme si c'était encore à nous de nous réadapter. À la fin de l'hiver, je suis complètement épuisée par mon besoin d'être opérationnelle sur toutes les facettes de ma nouvelle vie. À la pause-déjeuner, il m'arrive d'aller faire des siestes dans le cagibi au bureau pour tenir le coup. Je passe alors clairement par une phase sombre (l’hiver n’aide pas) pendant laquelle je me sens complètement dépassée. Je pleure constamment. C’est d’autant plus culpabilisant que j’ai la sensation d’être ingrate, d’avoir voulu pendant des années une chose et de ne pas savoir m’en satisfaire maintenant que je l’ai. 

Aujourd'hui encore, il y a bien souvent des moments où je me sens toujours autant dépassée. Je pense qu'il me faudrait un peu plus de lâcher prise, j'y travaille. Une chose que l'on a réussi à mettre en place avec mon mari, c'est de s'accorder une soirée chacun par semaine. Cette soirée, on peut ne rien en faire tout comme on peut en profiter pour sortir avec des amis ou faire du sport. Nous étions des personnes qui sortions énormément avant notre enfant, il nous a semblé essentiel de continuer à vivre un peu notre vie même si notre rôle de parent prend beaucoup de place. Et puis parfois, tous les trois ou quatre mois, on se prend une journée off, rien qu'à deux, quand Amaziah est à la crèche, pour aller se promener dans Paris, aller déjeuner, flâner (il faudrait qu'on se l'autorise plus souvent).

 
(...) je ne regrette pas d’avoir eu à vivre ça en cachette et d’avoir continué à sourire même pendant les moments plus compliqués.  
 

Aujourd’hui, aucun de nos proches ne sait ce que nous avons traversé pour en arriver là, et je ne regrette pas d’avoir eu à vivre ça en cachette et d’avoir continué à sourire même pendant les moments plus compliqués. Là où certaines femmes ont besoin d’être accompagnées, d’échanger et d’en parler à leurs proches, moi, je sais très bien faire « comme si », et c’est même ce qui m’a boostée à un moment. Maintenant que mon fils est là, je fais tout pour lui transmettre mon amour des voyages et l’intégrer à mon envie constante de l’ailleurs ! Il a déjà visité 5 pays sur 3 continents différents, à seulement 1 an et demi ! Finalement, voyager avec un bébé en bas-âge, c'est juste un peu plus d'organisation pour m'assurer qu'il aura de quoi manger, être changé et soigné sur place. En dehors de toute cette organisation, c'est plutôt très cool et ça fait des tas de souvenirs qu’on aura à lui raconter plus tard. 

 

Ces 10 années de vie à deux, “seuls”, sans enfant, n'ont certes pas été un choix mais ça nous a permis de nous connaître parfaitement, mon mari et moi (...)  

 

Ces 10 années de vie à deux, “seuls”, sans enfant, n'ont certes pas été un choix mais ça nous a permis de nous connaître parfaitement, mon mari et moi, d’évoluer ensemble et de faire ce dont on avait envie. J'aime me dire que nous avions toutes ces choses à vivre en amont pour apprécier d’autant plus cette chance de devenir parents. "

 

Les tips d’Asléa 

Profiter de "l’avant maternité" quelle que soit sa durée. 
Lâcher prise (et ça fonctionne aussi quand on n’a pas d'enfant). Le voyage y aide car il y a cette nécessité de se réinventer chaque jour. 

La pensée freestyle d’Asléa  

Être mère, c’est absolument génial. On se découvre un amour inconditionnel pour un petit être et des capacités hors-norme, c’est une expérience magique ! Mais ce bonheur est aussi déroutant, épuisant, dur, c’est la fin de l’insouciance et le début de l’inquiétude constante pour ce bébé qui compte sur toi. Alors pour savourer d’autant plus ce que la maternité a à t'apporter, profite sans compter de la période “avant-enfant”. 

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Comme ce témoignage cacher difficulté tomber enceinte, tu as peut-être toi aussi une histoire forte à raconter. Alors écris-nous à ton tour  

* L’hystérosalpingographie est un examen d’imagerie médicale qui permet de visualiser l’utérus et les trompes utérines. Il est proposé et réalisé lorsqu’une femme rencontre des difficultés pour concevoir un enfant. 

{Asléa-short stories}

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