L’imprévu, c’est souvent la seule certitude de l’accouchement. Et quand une tempête éclate, la sage-femme est comme un phare. Elle est ce minuscule point à l’horizon qui continue de briller, quoi qu’il arrive. Et nous, on s’y accroche de toutes nos forces. Quand Laurie a dû finalement accoucher sans péridurale, c’est Carole, sage-femme à l’énergie incroyable, qui a rallumé en elle la confiance qu’elle croyait perdue. À ce moment précis, Carole était LA bonne personne pour elle. La seule qui pouvait sauver son accouchement.
“ Je m'appelle Laurie, j'ai 31 ans.
Je suis originaire de Dunkerque et, depuis 10 ans, je vis à Toulouse. Je suis à la fois infirmière libérale et infirmière en éducation thérapeutique.
Ma famille est composée de Yoann, mon mari depuis 4 ans, de Meï, notre fille née en octobre 2024, et de Sam, notre chien de 7 ans.
Je rencontre Yoann un jour de décembre 2015. À l'époque, je suis infirmière aux urgences de Purpan, tout comme lui. Lors d'une nuit de travail où mon secteur est plutôt calme, je décide d’aller voir s’il n’y a pas besoin de renfort ailleurs. Là, je tombe sur Yoann, en tenue bleue d’interne. Gros flash ! De retour dans mon service, je dis tout de suite à ma binôme aide-soignante : “Wouah, pas mal l'interne de l'autre côté !”. Je n'ose pas l'aborder tout de suite mais, le destin se charge de le placer sur mon chemin : je tombe sur son profil sur “Adopte un mec”, trois jours plus tard. Quelques messages et un date au marché de Noël plus tard, nous voilà ensemble !
Dès le début, je sais que Yoann veut des enfants. Pour moi, c'est moins évident. Avec le monde dans lequel on vit, je m'interroge... Le monde est vaste, je peux me nourrir de voyages, d’ami·e·s et de vin ! Puis, en 2023, après notre second mariage (merci la pandémie de Covid...), je me sens différente. L’impression de ne pas avoir de but, qu’il manque quelque chose à ma vie. Alors je me dis : go ! Première étape : tomber enceinte !
Novembre 2023. Je retire mon stérilet et je mets toutes les chances de mon côté : tests d'ovulation, calculs, timing. Je fais deux tests de grossesse... tous les deux négatifs. Même si je sais que ça peut ne pas fonctionner du premier coup, je ressens un grand vide à chaque fois. C’est ma nature pessimiste qui parle… Puis je finis par tomber enceinte lors d’un rapport qui n’était même pas prévu, en dehors des fameuses "périodes idéales". Comme quoi…
Le premier trimestre est marqué par les nausées, la fatigue et le stress (beaucoup). À 6 semaines de grossesse, j’ai des saignements. Panique à bord ! En larmes, j'appelle ma sage-femme qui me répond : “Mais pourquoi vous vous mettez dans cet état ? On attend et on verra.” Je suis profondément choquée par sa réaction. Je ne suis pas ses conseils : direction les urgences. La gynécologue qui me reçoit est bien plus à l’écoute. À l’échographie, elle constate un décollement du placenta. Un peu de repos et un contrôle la semaine suivante devraient suffire. Ouf ! Tout va bien. Je m’empresse de changer de sage-femme. Et c’est là que je fais la connaissance (improbable) de la fabuleuse Coline…
Je la rencontre à la salle de Crossfit ! Tout de suite, j’aime son rapport au sport, sa gentillesse, sa douceur et son humour. Ce que je vois d’elle dans sa vie perso me donne confiance en celle qu’elle doit être dans son travail. Et l’avenir me donnera raison. Elle m’accorde beaucoup de temps lors des rendez-vous de préparation à la naissance et restera très présente à la naissance de ma fille, puis pendant mon post-partum.
Dès le début du 2ᵉ trimestre, j’ai des contractions. Je dois arrêter le sport assez vite (je conserve un peu de yoga) et j’arrête de travailler à 5 mois de grossesse. Le travail libéral et la grossesse, quel défi ! Quelle source de stress aussi ! On a dû faire face à quelques situations financières délicates qui nous ont même poussés à suspendre notre crédit immobilier pendant six mois pour joindre les deux bouts. Mais globalement, ma grossesse se passe bien, et j’adore mon gros ventre. Je suis touchée par la gentillesse des gens quand ils voient que je suis enceinte.
“ Après 20 minutes de trajet, je dis à Yoann : «Non, fais demi-tour, je le sens pas.» "
Samedi 12 octobre. Je suis à 38 SA + 5. Quelques contractions depuis 2–3 jours, mais Coline me dit que cela ne signifie rien : l'accouchement peut arriver demain comme dans 10 jours… Ce jour-là, nous avons un anniversaire à une heure de route. Dans le doute, je mets ma valise de maternité dans la voiture. Et puis après 20 minutes de trajet, je dis à Yoann : “Non, fais demi-tour, je le sens pas.” Je ne sais pas trop ce qui me pousse à rentrer… une part d’instinct, j’imagine car je n’ai ni contraction franche, ni perte du bouchon muqueux...
Dimanche 13 octobre. 4h30. Les contractions commencent. Dans ma tête, j’entends la voix de Coline, ma sage-femme : “Quand le travail commencera, vous le saurez.” Et effectivement, je le sais.
5h00. On part à la maternité. On est pris en charge rapidement. L’examen confirme le travail : col dilaté à 1 cm. Je me souviens alors de mon rendez-vous avec l’anesthésiste, moi lui disant : “Je la veux vers 6 ou 7 cm.” Là, je suis à 1 cm et je la veux déjà ! On m’installe en salle de naissance, je suis à 3 cm.
“ La sage-femme vient vérifier si tout va bien. Elle constate alors que j’ai un œil plus petit que l’autre... je commence à avoir une paralysie faciale du côté droit. L’anesthésiste est appelé en urgence... “
07h30. Les contractions sont très intenses. L’anesthésiste arrive et m’administre la péridurale, je m’allonge et je perds les eaux. Une sage-femme m’examine : “C’est bien, c’est rapide.” En effet, une demi-heure plus tard, je suis à 8 cm. La péridurale fait effet. Yoann et moi lançons une partie de Mario sur la Switch. Puis la sage-femme revient : elle remarque que j’ai un œil plus petit que l'autre et identifie un début de paralysie faciale du côté droit. L’anesthésiste est appelé en urgence pour m’examiner : je fais un syndrome de Claude Bernard-Horner causé par la péridurale. Apparemment, c’est rarissime, la faute à pas de chance, me dit-on. Il faut l’arrêter immédiatement, sous peine de complications plus graves, comme une paralysie plus large du haut du corps. Il faut donc stopper la péridurale.
Je n’avais jamais imaginé accoucher sans péridurale, c’est pourtant ce que je m’apprête à vivre...
Je suis dans le déni. Je dis : “Pas de souci, vous m’enlevez celle-ci et vous m’en reposez une autre.” Sauf que non. Il va falloir faire sans. L’anesthésiste me retire donc la péridurale. Carole, la sage-femme présente, réagit immédiatement : “OK, eh bien, on accouche !” Elle me pose une perfusion d’ocytocine et me place sur le côté pour accélérer le travail. Elle prend le temps de m’explique. Je me souviens de cette phrase : “Là, Laurie, c’est le mental qui va primer.”
“ Carole, la sage-femme, me cerne tout de suite. Elle comprend que j’ai besoin d’être boostée et elle se transforme en coach de crossfit ! “
10h48. Je pousse ! L’avantage de ne pas avoir de péridurale ? C’est moi qui dis quand pousser. Carole me cerne tout de suite. Elle comprend que j’ai besoin d’être boostée et elle se transforme en coach de crossfit ! Je me souviens de ce moment presque poétique où elle enlève ses chaussures : “J’ai besoin d’être ancrée dans le sol pour aider une femme à faire naître son bébé.” Elle me guide, m’encourage à chaque poussée. Pendant 26 minutes, elle est mon pilier. Puis Meï arrive. J’avais rêvé de ce moment des centaines de fois : mon bébé posé sur moi, un moment de pure joie. Mais là, rien…. je ne ressens rien. La douleur a été tellement intense, je suis encore en état de choc. Les 24 heures qui suivent mon accouchement, je ne cesse d’avoir l’image de Yoann, désespéré d’être impuissant, et cette sensation d’avoir été ouverte en deux. Je ne fais que répéter : “C’était horrible.”
Aujourd’hui, quand on me dit : “ Wouah, tu as accouché sans péridurale ! Bravo ! “, je ne sais pas trop quoi répondre. En vérité, je n’ai pas eu le choix. Mon bébé était là, déjà bien engagé dans mon bassin, il fallait pousser, il n’y avait pas d'autre issue. Quand j’y pense, que je me refais le film de l'accouchement, je fonds encore en larmes. J’ai commencé une thérapie EMDR. Grâce à elle, j’ai pu “classer” ce dossier “douleur”. J’ai compris que mon accouchement avait réveillé des traumatismes et que j’avais misé sur la péridurale pour ne pas souffrir, et qu’une fois de plus, j’avais dû me débrouiller seule. Ma psy m’a dit : “La vie vous donne l’occasion de réparer votre passé.” Pour elle, cet accouchement prouve que je suis capable. Que je peux compter sur moi. Et sur les autres. Et j’y crois de plus en plus. Finalement cet accouchement me donne chaque jour un peu plus confiance en moi. Je ne suis pas encore prête à dire que c’était “un mal pour un bien” mais peut-être qu’un jour…
Je n’oublierai jamais Carole. Elle a sauvé mon accouchement. Elle a été LA personne qu’il me fallait à ce moment-là.
Et Coline… je la remercie encore. Merci d’avoir été si présente à chaque étape. Merci de m’avoir écoutée, d’avoir accueilli mon récit, plusieurs fois. Merci pour la séance post-partum avec les autres mamans du cours de préparation à la naissance. C’était salvateur. Je me souviens d’une d’elles disant ne pas avoir eu de coup de foudre pour son bébé. Ça m’a fait du bien de l’entendre. Grâce à Coline, je pense avoir évité une dépression post-partum. Alors s’il y a un deuxième bébé, ce sera avec elle. Ou rien. “
Les tips de Laurie
Se préparer à accoucher sans péridurale (au cas où).
Se rappeler que l’absence de péridurale, ça n’arrive pas qu’aux autres.
La pensée freestyle de Laurie
Tout d’abord, un énorme merci à mes deux sages-femmes. Carole, qui a été mon phare en pleine tempête lors de la poussée. Et Coline, ma sage-femme libérale qui nous avait prévenus que le coup de foudre avec son bébé pouvait ne pas être immédiat. Grâce à elle, je n’ai pas culpabilisé. Et… rendez-vous à la prochaine grossesse ! J’ai accouché en 7 heures pour mon premier, et grâce à Bliss, je sais désormais ce qui peut m’attendre pour le deuxième… L’accouchement… quelle aventure !
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